A propos du Tibet…
Chaque matin, je bois mon café à la terrasse d’un petit restaurant de quartier : une mauvaise bicoque en planches, une paire de tables en bois défraîchies et quelques chaises en plastique dépareillés. On est bien loin de la brasserie parisienne ou du bistrot lyonnais mais l’ambiance est la même : un groupe d’habitués qui se retrouvent avec plaisir pour débuter la journée en commentant le dernier spot d’informations de RFI, des connaissances de passage venant de quelque part et se rendant un peu plus loin, s’arrêtant pour saluer, l’animation matinale de la rue avec les élèves en uniformes, les militaires faisant leur jogging en cadence, les taxis bondés et les petits commerçants installant leur étale de beignets de manioc, de bois de chauffe ou encore de coiffure.
Parmi le petit groupe des réguliers se trouve un journaliste travaillant pour l’un des rares quotidiens centrafricains. Or, lundi matin, entre deux gorgées de (nes)café noir, le voici qui reçoit un appel de l’Ambassade de Chine à Bangui. Il est invité à une conférence de presse, l’après-midi, au sujet des évènements actuels au Tibet. La veille, il avait déjà été convoqué pour la remise d’un communiqué de presse très partial qu’il me montre aussitôt. « Les émeutiers ont tué 13 civils… », « Les policiers sont restés patients… », « Les tibétains nourrissent une aspiration à la réunification…», « le dalaï-lama et sa clique… ». Son journal n’avait pas souhaité le publier.
17h. Je croise notre journaliste en ville. Il revient de l’Ambassade de Chine. Son Excellence Monsieur l’Ambassadeur lui a vanté toutes les nombreuses qualités de son quotidien puis lui a offert, pour la rédaction, une télévision et un ordinateur neufs. Le journal, qui tire le diable par la queue, a accepté.
Le communiqué a été publié mardi matin.