Noirs Souvenirs

Des paysans sont en train de sarcler la terre. Un peu plus loin, une femme puise de l’eau. Les récitations de l’école coranique accompagnent le chant du coq. Quelques chèvres fouillent le village a la recherche de nourriture à grignoter. Les marmites chauffent sur les foyers de pierres. Des enfants se poursuivent en riant.

Et soudain, des hommes surgissent armés de fusils mitrailleurs. Ils tirent au hasard, renversent, cassent, pillent. Quelques habitants s’enfuient affolés. Les autres sont abattus sans pitié et les jeunes filles emmenées sans ménagement. La scène n’a duré que quelques instants et le silence s’est installé. Des corps gisent au milieu de débris de toute sorte.

Puis le sketch joué par les enfants réfugiés du camp d’Oure Cassoni se poursuit. Des forces armées recherchent les assaillants tandis que les paysans passent la frontière pour trouver refuge au Tchad auprès des populations locales puis sous la protection du HCR et l’aide des ONG. Les journalistes effraient les enfants avec leurs cameras, les humanitaires sont caricaturés avec leur radio VHF et leur sac sur l’épaule.

Lundi 21 juin. Journée Internationale du Réfugié. Depuis le matin, les discours, les chants, les sketchs se succèdent. Les jeunes filles drapées dans leurs tissus de couleurs éclatantes sont magnifiques et la cible des photographes. Les hommes, barbus, en djellaba et turban blanc semblent austères et fiers. Silencieux. Les enfants s’agglutinent depuis des heures sous le soleil autour de l’espace de représentation où trône une mauvaise sono sur une table chancelante.

Apres la prière, la journée se poursuivra par la plantation symbolique de 15 arbres dans chacune des trois écoles puis un débat sur les droits et devoirs des réfugiés.

En attendant, des enfants gisent dans le sable, « tués » par des armes en bois recouverts de plastique noir et d’un réalisme macabre.