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D'ici et d'ailleurs
17 février 2007

Karyari

Arme

Au bout de nulle part, aux confins du désert, à la frontière de deux pays de sable et de rochers. Il y avait une armée, avec des canons, des avions, des hélicoptères, des mitrailleuses. Il y avait des rebelles, avec des kalachnikovs et de la haine. Il y avait le désert.

Pendant longtemps, ils se sont regardés. Ils se sont côtoyés. De loin. Evités. Les rebelles jouaient avec la frontière, bougeaient, provoquaient, repartaient.

L’armée s’installait.

Une nuit, les rebelles ont attaqué. Pick-up et turbans couleur poussière. Rafales. Peur. Des balles ont traversé l’air desséché à la rencontre de corps qui auraient dû vivre pour la caresse d’une femme, le baiser d’un enfant. Mais, sous les étoiles, la haine animait ces hommes, leurs chefs.

L’armée s’est enfuit. Les pick-up les ont poursuivis. Et les morts, les blessés sont restés sous le soleil qui se levait. Inutiles.

Des nomades les ont ramassés, les ont pillés, les ont amenés au dispensaire de ce coin de vide.

Et je les ai vus. Ils gisaient là, dans le couloir, dans les chambres, sur des couvertures sales et déchirées, enroulés dans des turbans et des vestes tachés de sang, prostrés. A terre, un infirmier, agenouillé, soignait un visage abîmé. Avec quelques pansements, quelques compresses, une aiguille. Un visage qui souffrait.

Dans le couloir, ils attendaient. Ils avaient été abandonnés. Soldats et rebelles allongés ensemble, sans rien pour les différencier, sans rien pour les reconnaître.

Le dispensaire était silencieux. Pas de gémissement. Que le vent. Et la poussière. Et ces ombres couchées, pour avoir écouté, pour avoir choisi, pour avoir obéi, pour avoir suivi.

Je suis passé au milieu de ces corps. J’ai cherché leur regard. Mais nous étions étrangers.

Nous nous étions croisés ici. Nos chemins se séparaient à nouveau.

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